Catégories
Livres

Cette affaire infernale

Les philosophes contre Jean-Jacques : le sous-titre de ce livre de 1942 en dit l’axe. Pour Guillemin, le séjour malheureux de Rousseau chez son confrère écossais Hume, en 1766, marque le moment de son rejet définitif par Voltaire et ses suiveurs. Pourquoi ?

Parce que Rousseau est chrétien. Pas un chrétien de façade (on ne s’en formaliserait guère), mais un homme qui croit « tout de bon à l’Évangile », qui « est de la race haïssable des crieurs de Dieu », et dont on ne saurait donc s’encombrer dans la lutte nécessaire contre « l’Infâme ».

Ce que Guillemin met en avant chez ce Rousseau aussi naïf que susceptible, c’est sa dignité, sa droiture : quand il adresse à Hume (qui le diffusera) le mémoire dans lequel il tente de se défendre, il sait bien que c’est inutile ; mais voilà : « Savoir d’avance le prix qu’il en coûtera d’être loyal avec un fourbe n’est point une raison suffisante pour se dispenser d’agir comme on doit ».

Guillemin a choisi dès ce livre son camp spirituel et politique, car des certitudes de Rousseau aux convictions de Robespierre et à l’interprétation de la Révolution, il n’y a plus qu’un pas à franchir, longuement mûri au fil des conférences et dont la synthèse s’épanouira dans le Robespierre si rousseauiste de 1987.

Catégories
Livres

Jean-Jacques Rousseau ou “la méprise extraordinaire”

Inédit en volume jusqu’à 2014, ce texte de 1937 a été établi et annoté par Patrick Berthier. Il a été publié à l’origine en trois articles dans la revue dominicaine La Vie intellectuelle.
Premier travail d’importance de Guillemin sur Rousseau, cette étude peut se lire comme une ébauche des livres qui ont suivi, en 1942 (Cette affaire infernale) et en 1943 (Un homme, deux ombres).

Il s’agit en effet déjà d’y passer au crible les idées répandues alors sur l’écrivain et sur l’homme, de montrer en lui un chrétien, certes non orthodoxe mais sincère, et d’expliquer par la réalité gênante de sa foi la volonté des philosophes de le mettre à l’écart.

Dans cet ouvrage, où sa manière personnelle est déjà si sensible, Guillemin affirme que « si Rousseau a été détraqué, c’est parce qu’il a été traqué », ce que pensait aussi Robespierre, qu’il a tant influencé ; mais Guillemin dit aussi comment, par-delà les calomnies, le Rousseau des années ultimes a connu la paix intérieure.

Catégories
Livres

Un homme, deux ombres

Guillemin a d’abord étudié, dès 1937, l’itinéraire spirituel de Rousseau (étude publiée par Utovie en 2014 sous le titre «Jean-Jacques Rousseau ou la méprise extraordinaire ». Puis est venu un ouvrage sur ses relations avec les philosophes : « Cette affaire infernale » (1942).

Un homme, deux ombres (1943) est consacré à un épisode antérieur de sa vie, son séjour à Montmorency, dans le logis que Mme d’Épinay avait mis à sa disposition pour qu’il pût y travailler : il s’y éprend de Mme d’Houdetot, maîtresse du littérateur et poète Saint-Lambert, et, bien que cette passion soit platonique, Rousseau doit partir, chargé par la calomnie des pires horreurs.

Dans un dossier de deux cents pages, « Les affaires de l’Ermitage (1756-1757) », publié par les savantes Annales de la Société Jean-Jacques Rousseau, Guillemin note, certes, les inexactitudes des Confessions de Rousseau lui-même, mais dénonce aussi, pièces en main, la façon dont Diderot et Mme d’Épinay (dans ses Mémoires) ont falsifié les faits, parfois en dépit de la chronologie, pour nuire à Rousseau et le faire passer à la fois pour immoral et pour fou.

Ce travail minutieux est présenté presque en même temps en librairie sous la forme d’un volume grand public, celui que réédite Utovie et qui donne un accès à la fois facile et séduisant à la personnalité si complexe de Rousseau.